Stop à la censure et aux jugements hâtifs !
Comme vous avez pu le remarquer, il n’y a pas eu ces deux dernières semaines de nouvelles de notre projet. Nous avons bien avancé mais je n’ai pas le temps de rédiger des retours, car je suis en plein dans les révisions pour les concours d’assistant qualifié principal de 2ème classe de conservation du patrimoine et des bibliothèques, où je suis admissible.
Toutefois, il se passe en ce moment toute une polémique autours des livres qui s’intéressent (sans prétentions) aux préjugés sexistes (tenez, n’est-ce pas là-dedans que s’insère notre projet autour de l’égalité hommes-femmes ?). Des ouvrages que l’on accuse de pervertir la jeunesse mais qui, rappelons-le, depuis leur publication n’avaient causé aucun problème. Et peut-être pourrait-on rappeler aussi que tous les livres publiés à destination de la jeunesse doivent suivre la Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. Que dit cette loi ? « Les publications visées à l’article 1er ne doivent comporter aucune illustration, aucun récit, aucune chronique, aucune rubrique, aucune insertion présentant sous un jour favorable le banditisme, le mensonge, le vol, la paresse, la lâcheté, la haine, la débauche ou tous actes qualifiés crimes ou délits ou de nature à démoraliser l’enfance ou la jeunesse, ou à inspirer ou entretenir des préjugés ethniques ou sexistes. »
Si ces livres sont aujourd’hui encore en circulation, c’est qu’ils ont donc été jugés conformes à la loi. Pourquoi vouloir faire sa propre loi en allant faire pression sur les écoles et les bibliothèques pour qu’ils retirent ces ouvrages ? Pourquoi aller insulter et harceler les éditeurs et les auteurs ? Messieurs dames, les enfants ne sont pas aussi influençables que vous ne le pensez : tout ce qu’ils lisent ne va pas se graver dans le marbre dans leur têtes, mais ils grandissent grâce à la diversité des modèles qu’on leur présente. Et il ne se passe pas du tout la même chose dans leur tête que dans la notre, et ce que nous trouvons choquant ne va parfois pas même les faire tilter. Prenons la chanson de l’Helicon de Bobby Lapointe :
« Eh bien, y a ton ami Elie
Qui n´est pas très intelligent
Si tu veux vas jouer avec lui
Non maman c´est pas ça l´vrai instrument
Moi j´veux jouer de l´hélicon
Pon pon pon pon
Ah! tu m´énerv´s, Ah! c´en est trop
Tiens : pan pan pan boum, toc il tombe
Ell´ l´a tué à coup d´marteau
Et l´on a fait graver dessus sa tombe
» II voulait jouer de l´hélicon
Pon pon pon pon
Con « »
Croyez-vous que les enfants vont réagir sur le fait que la mère tue son fils ainsi ? Non. Par contre, ils sont choqués quand on leur explique le jeu de mots avec Elie et le fait qu’il ne soit pas très intelligent donc « con » (et oui on a dit que quelqu’un était con quand même, c’est grave ! Que la mère ait tué son fils ne les surprend pas).
Je ne vais pas revenir sur tout ce qu’on voit et revoit dans les médias en ce moment, mais je tenais à assurer à ma manière mon soutien pour ces bibliothèques, ces auteurs, ces éditeurs parce que je suis concernée dans mon métier, dans ce projet avec mes sœurs, mais aussi tout simplement parce que je trouve ça intolérable comment certains se permettent de parler sans connaître (et qui ne chercheront par ailleurs pas toujours à s’ouvrir un peu l’esprit aux autres, au monde…) et de foutre le bordel sans considération pour les autres. C’est comme l’histoire de la mère qui se plaint un jour parce qu’à la bibliothèque se trouvait un ouvrage qui ne correspondait pas à ses valeurs (ça parlait d’homosexualité) et qui se plaint en argumentant que, comme il est disponible, elle ne peut pas interdire à sa fille de le prendre et donc il devrait être interdit en bibliothèque… Pardon ? Si ça ne te plait pas, tu interdis à ton enfant d’en prendre. Tu es le parent, non ? Combien de fois je vois des parents qui refusent à leur enfants de prendre tel ou tel livre (notamment des mangas)… Ça ne veut pas dire systématiquement que l’on va retirer ces documents des bibliothèques ! Ces livres ont le droit d’exister et d’être accessibles, après, libre à chacun de l’approuver ou non, de l’emprunter ou non, sans chercher à imposer son point de vue aux autres…
Pour en savoir plus :
Copé s’en prend à « tous à poils » : http://next.liberation.fr/sexe/2014/02/10/tous-a-poil-cope-ne-manque-pas-de-culotte_979119
Réponse du Rouergue : http://jeunesse.actualitte.com/reportages/cope-tous-a-poil-la-reponse-de-l-editrice-717.htm
Réponse de l’auteur : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1144548-je-suis-l-auteur-du-livre-tous-a-poil-cope-n-a-rien-compris-a-notre-ouvrage.html
Le Printemps français et ses velléités de censure : http://www.actualitte.com/bibliotheques/le-printemps-francais-reclame-le-retrait-de-certains-ouvrages-des-bibliotheques-48087.htm
La réaction du ministère : http://www.culturecommunication.gouv.fr/Espace-Presse/Communiques-de-presse/Aurelie-Filippetti-ministre-de-la-Culture-et-de-la-Communication-condamne-les-pressions-exercees-par-des-extremistes-sur-les-bibliotheques-publiques
(Beaucoup de structures ont exprimé également leur soutien comme l’ABF, l’ASLJ… Mais aussi des auteurs comme Claude Ponti : http://www.liberation.fr/debats/2014/02/12/claude-ponti-critiquer-un-livre-pour-enfant-sans-le-comprendre-est-bete_979638)
Article d’Anne Percin, une des auteurs de « Le jour du slip/je porte la culotte » : http://annepercin.blogspot.fr/2014/01/intolerance.html (Anne Percin sera présente à Grenoble pour le Printemps du Livre).
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